Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

d’esprit et de manières, pédante et pétrie de vanité, mais douée d’une assez robuste intelligence, Mlle  de Gournay écrit, en 1622, son traité de l’Égalité des Hommes et des Femmes, œuvre originale par sa méthode et sa forme, si l’on fait abstraction de la Cité des Dames de Christine de Pisan, que sans doute elle ignorait.

Comment va-t-elle démontrer l’égalité des sexes ? Par des exemples tirés de l’histoire sacrée et profane, par le témoignage des Écritures, des Pères de l’Église et des historiens anciens ? Sans doute, puisque telle est la mode de son temps. Mais bien plutôt elle s’appuiera sur le témoignage qu’offrent les vieilles institutions féodales et sur l’observation de la vie quotidienne.

Les pairesses qui siégèrent au Parlement et surent conduire leur fief, les régentes, sans lesquelles si souvent « l’État eût été par terre », voilà les avocats les plus éloquents, les plus persuasifs de l’égalité des sexes. Que souvent les femmes soient inférieures aux hommes, Montaigne l’a dit et Mlle  de Gournay ne reniera pas son père spirituel. Mais s’il en est ainsi, c’est que les femmes sont peu ou mal instruites. Une réforme dans l’éducation ramènera la femme à sa juste place. Et cette place doit être très grande : la femme peut étudier les belles-lettres, s’adonner aux sciences, mieux enseigner lettres et sciences ; le sacerdoce même ni la politique ne lui devraient être interdits. En un mot, nulle différence de nature ni d’aptitude entre l’homme et la femme. Car Dieu a créé l’être humain, homme et femme, et l’un comme l’autre concourent également à la réalisation de ses desseins.