Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/198

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ouvrage, premier manifeste du féminisme allemand, fait sensation.

Comme son émule anglaise, d’ailleurs, le bourgmestre de Kœnigsberg est poussé au combat par les exagérations du « rousseautisme », alors très populaire en Allemagne.

« Le philosophe genevois, dit-il, se trompe lourdement, et avec lui l’opinion universelle lorsqu’ils imaginent innées et naturelles les différences qu’en nos siècles de civilisation, on peut constater entre le caractère et l’esprit de l’homme et de la femme. La femme faible, inconséquente, inapte souvent à exercer un métier, incapable de gagner sa propre vie, inutile à l’État, c’est l’homme qui l’a créée. L’assujettissement des femmes est un produit de notre artificielle civilisation. »

Mais comment le monde pourrait-il marcher vers le bonheur quand la moitié du genre humain est privée de toute influence sur ses destinées ? Émancipons les femmes ; nous réaliserons le dessein de la nature qui les a voulues nos égales, qui, par elles libérées, c’est-à-dire grandies, ennoblies, veut « le progrès et le bonheur ».

Donc, si l’on proclame les droits de l’homme, il faut proclamer aussi les droits de la femme. La justice l’exige, et aussi l’intérêt public qui commande « de ne pas laisser inutile une moitié noble et grande du genre humain ». Donc, dans le nouvel ordre de choses, la femme laissera à l’homme « le seul monopole de l’épée, si vraiment l’humanité ne peut vivre sans hécatombes », et se tiendra, avec honneur et profit pour elle et pour le monde, au comptoir, à l’atelier, à la banque, au tribunal. Dans les assem-