Page:Aboulféda - Vie de Mohammed - traduction et commentaires par Desvergers, 1837.pdf/17

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
VIE DE MOHAMMED.

de son père, dans la nuit de la naissance du prophète, le palais de Kesra trembla, quatorze de ses tours s’écroulèrent, le feu sacré des Perses s’éteignit, ce qui n’était pas encore arrivé en mille ans : le lac Sawa se dessécha (5), et le moubedhan, c’est-à-dire le grand juge des Perses, vit en songe des chameaux indomptés qui trainaient à leur suite des chevaux arabes, et qui, ayant traversé le Tigre, se répandirent dans la campagne. Le lendemain matin Kesra tout effrayé apprit du moubedhan ce qu’il avait vu dans son sommeil. « Mais que peuvent signifier de tels prodiges, demanda Kesra ? » et le moubedhan, homme plein de science, lui répondit : « Sans doute est arrivé quelque chose de nouveau du côté des Arabes. »

Aussitôt Kesra écrivit à Noman (6), fils de Mondher : « Envoyez-moi un homme assez habile pour répondre aux questions que je veux lui faire. » Noman lui envoya Abd-el-Meçih, fils d’Amrou, fils de Henan el-Ghassani. Kesra lui ayant raconté les secousses qui avaient ébranlé son palais, ainsi que les autres prodiges : « Vous obtiendrez les explications que vous désirez, répandit Abd-El-Meçih, auprès d’un de mes oncles qui demeure dans la province de Mescharif, en Syries il se nomme Satih (7). — Rendez-vous donc auprès de lui, reprit Kesra, interroger-le, et venez m’apprendre l’interprétation qu’il vous donnera, » Abd-el-Mecib s’étant transporté auprès de Satih, le trouva sur le point de mourir ; lui adressa cependant des compliments et des salutations ; mais comme il n’en recevait pas de réponse, il récita ces vers :

« Est-il sourd ou entend-il, le chef de l’Yemen, ou bien déjà est-il mort et a-t-il été enlevé dans les hauteurs des régions célestes ? O toi, habile à trancher des difficultés qui en ont rebuté tant d’autres ! toi qui éclaircis le front