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AUX HONNÊTES GENS

on espère qu’ils deviendront un jour l’honneur du quartier et que la gloire leur tombera du ciel, toute rôtie. Tandis que nous travaillons à nos pièces et à nos livres, ceux-là nous jugent sans nous lire, nous condamnent sans nous entendre. Quiconque a fait un peu de bruit dans le monde des honnêtes gens est leur ennemi. Il semble que nous leur ayons volé toutes les idées qu’ils n’ont pas eues et tous les ouvrages qu’ils n’ont pas faits. Je me consolerais de la chute de Gaëtana si elle pouvait ouvrir les yeux des vrais étudiants et séparer le corps de l’armée de cette queue traînarde et honteuse.

Déjà quelques jeunes gens des écoles m’ont fait l’honneur de m’écrire pour dégager leur responsabilité de ces turpitudes. L’un d’eux m’envoyait aujourd’hui ces belles paroles que je suis heureux de citer pour l’honneur de la jeunesse : « Un ouvrier de Paris serait chassé de l’atelier s’il détruisait l’ouvrage d’un autre : croyez, monsieur, que les vrais travailleurs de nos écoles sont aussi incapables de commettre un crime de lèse-travail. » Un autre, qui écrit fort bien, ma foi ! quoiqu’il ne se fasse point imprimer dans les petites feuilles de la rive gauche, terminait par ces mots : « Je voudrais pouvoir placarder ma lettre à tous les piliers de l’Odéon, et je trouverais peut-être assez de jeunes gens, de ceux qui ne se laissent pas facilement enrôler dans le troupeau de Panurge, pour signer cette protestation et flétrir, comme il convient, un déni de justice et une lâcheté. »