condamnée à mort ; mais du moment où elle parut s’installer dans ce monde, il lui ouvrit son cœur à deux battants.
Les plus proches voisins de la maison étaient Mme Vitré et son fils. Ils devinrent en peu de temps ses amis les plus intimes. La baronne de Vitré était une Normande réfugiée à Corfou avec les débris de sa fortune. Comme elle évitait de raconter son histoire, on n’a jamais su quels événements l’avaient chassée si loin de son pays. Ce qui sautait à tous les yeux, c’est qu’elle vivait en femme de bien, et qu’elle élevait admirablement son fils. Elle avait quarante ans et une beauté un peu commune : on l’aurait prise, en France, pour une fermière du pays de Caux. Mais elle s’occupait de son ménage, de ses oliviers et de son cher Gaston avec une activité méthodique et un zèle sans embarras qui trahissaient la race. La grandeur est un don qui se révèle dans toutes les situations de la vie et sur les théâtres les plus divers : elle se montre aussi bien dans le travail que dans le repos, et elle ne brille pas plus dans un salon que dans une buanderie ou une basse-cour. Mme de Vitré, entre ses deux servantes, vêtue, comme elles, du costume national, qui ressemble à l’habit des carmélites, était aussi imposante que Pénélope brodant les tuniques du jeune Télémaque. Gaston de Vitré, beau comme une jeune fille de vingt ans, menait la vie rude et exercée