Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/16

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Léon aperçut aussi quelques visages de connaissance, mais non tous ceux qu’il souhaitait de revoir. Car il se pencha un instant à l’oreille de sa mère en disant « Et Clémentine ? » Cette parole fut prononcée si bas et de si près que M. Renault lui-même ne put connaître si c’était une parole ou un baiser. La bonne dame sourit tendrement et répondit un seul mot « Patience ! » Comme si la patience était une vertu bien commune chez les amoureux !

La porte de la maison était toute grande ouverte, et la vieille Gothon sur le seuil. Elle levait les bras au ciel et pleurait comme une bête, car elle avait connu le petit Léon pas plus haut que cela ! Il y eut encore une belle embrassade sur la dernière marche du perron entre la brave servante et son jeune maître. Les amis de M. Renault firent mine de se retirer par discrétion, mais ce fut peine perdue : on leur prouva clair comme le jour que leur couvert était mis. Et quand tout le monde fut réuni dans le salon, excepté l’invisible Clémentine, les grands fauteuils à médaillon tendirent leurs bras vers le fils de M. Renault ; la vieille glace de la cheminée se réjouit de refléter son image, le gros lustre de cristal fit entendre un petit carillon, les mandarins de l’étagère se mirent à branler la tête en signe de bienvenue, comme s’ils avaient été des pénates légitimes et non des étrangers et des païens.