haies de romarin fleurissent tout l’hiver, et attirent par leur âcre parfum les artistes ailés qui travaillent sur l’Hymette. Les narcisses se montrent en février, les anémones et les asphodèles en mars : à la fin d’avril, tout est fleur. C’est le temps où les mélias se parent de grappes violettes ; les orangers frileux s’épanouissent sans crainte ; la vigne joue avec les amandiers ; les jasmins et les passiflores courent ensemble le long des murs, la clématite allonge ses grands bras autour de la tonnelle, et les rosiers grimpants s’amusent à barbouiller de rouge les vieilles palissades.
Nous avions dans notre jardin trois carrés incultes où l’on avait jeté une fois pour toutes quelques poignées de graines de toute espèce. Tout fleurissait en avril : pavots, camomille, sainfoin, fumeterre, coquelicot. Pendant un mois entier, les fleurs, les abeilles, les papillons, les lézards, les scarabées, les oiseaux qui cachaient leur nid dans les hautes herbes, se mêlaient, s’agitaient, se culbutaient ; et sous eux la terre inerte semblait s’animer d’une vie confuse. Au-dessus de ce mélange bourdonnant planait une bonne grosse odeur de miel dont le cœur était tout réjoui.
N’y pensons plus. Aussi bien, tout ce luxe se fanait le 1er juin pour laisser venir les myrtes et les lauriers-roses, qui se retiraient en juillet devant la poussière et les sauterelles.
La reine a, sans comparaison, le plus beau jardin du royaume. On y dépense, bon an mal an, cinquante mille drachmes, un vingtième de la liste civile. S’il y a quelque chose à envier dans la petite royauté de Grèce, c’est la possession de ce grand jardin. Je dis