Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/87

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esprit et un bon ou mauvais naturel. C’est l’histoire de toutes les femmes ; elles sont ce qu’on les fait. Janthe, qui n’avait qu’une fortune médiocre, rencontra ce qu’on appelle un beau mariage : elle épousa lord E….

Lord E… était en amour un gourmet un peu bien blasé : il fallait qu’il fût terriblement affriandé par cette beauté rose et blanche, pour qu’il s’embarquât dans un mariage disproportionné. Cet homme, qui épousait pour son plaisir, traita sa femme comme une chose qu’on a payée. Il en fut bientôt puni. Janthe distingua le prince de S…, secrétaire d’une des grandes ambassades d’Allemagne. Le prince était fort beau : j’ai vu une miniature que Janthe conserve précieusement en souvenir de son premier amour. D’ailleurs il portait un grand nom, il était plein d’esprit ; il était destiné à devenir premier ministre dans son pays : mais ce point-là ne la préoccupait guère. Elle aima le prince comme on lui avait appris à aimer. Dans les premiers jours, elle garda son bonheur secret ; mais bientôt elle n’y tint plus. Son mari avait été nommé gouverneur d’une province anglaise plus grande que l’Europe : elle ne voulait point quitter l’Angleterre. Un beau matin elle monta sur les toits, et cria très-distinctement à tout le Royaume-Uni : « Je suis la maîtresse du prince de S… ! » Toutes les ladies qui avaient des amants et qui ne le disaient pas furent grandement scandalisées : la pudeur anglaise rougit jusqu’au bout des cheveux ; lord E… témoigna son indignation par un bon procès, et le prince de S… fut condamné à payer l’honneur d’un pair d’Angleterre au taux marqué par la loi. Janthe devint libre par un divorce qui la condamnait à quitter l’Angle-