Page:About - Rome contemporaine.djvu/119

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deux adversaires ne doit pas être en veine, car il jette chaque carte sur la table avec un coup de poing à tout démolir : l’autre gagne sans rire et sans parler ; il boit à petits coups. Un peu plus loin, un meunier du Tibre, bâti comme l’Hercule Farnèse, soupe copieusement avec sa femme et sa fille. La mère est grosse et commune, la fille belle et blanche comme Vénus. Ses cheveux noirs, liés en grosses nattes, sont tout ce qu’elle a sur la tête. Les filles de Rome ne portent ni bonnet ni chapeau ; la nature les a coiffées chaudement pour l’hiver. Ma jolie meunière, en revanche, est un peu surchargée de bijoux : rien qu’avec son collier et ses boucles d’oreilles on payerait les impôts de la république de Saint-Marin. Un beau fichu de dentelle se croise sur sa poitrine : c’est la mode au Transtévère. Mais la jupe est un peu plus bouffante que de raison ; la crinoline arrive en trois bateaux pour nous gâter le costume national. C’est plaisir de voir comme la mère et la fille vident un verre de vin que le père a rempli jusqu’aux bords. Les Romains, lorsqu’ils sortent de leurs habitudes de sobriété, sont les plus formidables buveurs de toute l’Europe ; et il y a peu de Romaines qui ne soient en état de tenir tête aux hommes. La Transtévérine la plus mignonne absorberait la ration de douze matelots, et elle ne chancellerait pas en sortant de table. Il est vrai qu’elles ont des pieds !


Vous me pardonnerez si, après ce premier coup d’œil autour de mon couvert, mon attention s’est concentrée un instant sur le souper qu’on m’avait servi. J’avais couru