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Page:About - Rome contemporaine.djvu/122

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deuxième fois. Le bouledogue, moitié sérieux, moitié riant, lui dit : « Assez plaisanté ! j’y suis pour huit sous de ma poche, et j’espère que tu vas me laisser boire ? — Il faut, répliqua mon bel ami, se contenter de peu et quelquefois de rien. Es-tu chrétien, oui ou non ? Exerce-toi donc à la vertu de patience ! »

Comme ces messieurs parlaient fort haut et que leurs voisins riaient aux éclats, l’attention du cabaret se tourna insensiblement de leur côté. La jolie meunière jeta plus d’un coup d’œil sur notre table, sans demander le consentement de ses parents. Nos regards se rencontrèrent deux ou trois fois, je crois même qu’elle me sourit franchement avec ce laisser-aller des filles d’Italie, qu’on aurait grand tort d’interpréter à mal.


Le seul homme qui n’eût pas l’œil à la passatelle était le vieux joueur de la table voisine. La fortune des cartes s’obstinait apparemment contre lui, car après cinq ou six martingales imprudentes, il avait mis au jeu sa montre d’argent pour tout perdre ou tout regagner. Avant de couper les cartes, il alla s’agenouiller devant la madone du cabaret, et la supplia de lui rendre ce qu’il avait perdu, avec quelque petit bénéfice, promettant de partager le surplus avec elle et de porter un gros cierge à l’église de Saint-Augustin. Cependant l’adversaire se signait discrètement et marmottait, sans sortir de sa place, une contre-prière à la même madone. La partie fut chaude, et je la suivis attentivement. Le vieux charretier la perdit comme