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Entre Velletri et la mer il y a dix lieues de pays qui sont un lieu d’asile. Ce vaste terrain, qu’on appelle la plaine Morte, est d’une insalubrité reconnue. On sait que les meurtriers n’y vivront pas longtemps ; on sait d’ailleurs que des innocents ne consentiraient pas à assainir un tel pays. Les coupables y restent impunis et occupés à des travaux publics, jusqu’à ce que la fièvre ait fait contre eux la besogne du bourreau.

Souvent l’assassin est dérobé aux lois par le crime d’un autre assassin. Une fille tombe sous le couteau à quatre heures du soir ; on relève le cadavre de son meurtrier avant la nuit. Le crime était déjà expié lorsque la justice en eut connaissance. Aussi arrive-t-il que le coupable se livre lui-même pour échapper aux vengeances privées, et préfère la prison à tous les autres lieux d’asile.

Quand la justice le tient, voici une autre série de difficultés qui commence. On ne trouve pas de témoins qui déposent contre lui. Vous ressusciteriez le mort lui-même, qu’il ne dirait pas le nom de son meurtrier. On ramasse un homme éventré dans la rue et respirant encore un peu. « Qui t’a mis dans cet état ? — Personne ; va chercher le prêtre et ne parlons pas du reste. » Il a réglé ses comptes avec un ami ; il ne songe plus qu’à les régler avec Dieu. Un homme en poignarde un autre : l’un part pour le bagne, l’autre pour l’hôpital. Quand l’un sera libéré et l’autre guéri, ils se donneront la main sans rancune. Mais si le blessé avait avoué devant les juges qu’il eût reçu une blessure, ni l’assassin, ni ses parents, ni ses amis ne le laisseraient jouir de sa convalescence.

Le refus de déposer en justice est un mal tellement incurable, qu’on ne trouve pas de témoins, même contre