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notre hippodrome de planches, est le théâtre de la tombola. Toute la ville y vient en corps ; les boiteux et les paralytiques sont chargés de garder les maisons.

Cette fête de la Sainte-Monnaie est aussi solennelle que pas une et plus populaire que beaucoup d’autres. On y voit autant de capucins qu’à la procession la plus suivie. Le soleil, la musique, les toilettes, l’intérêt passionné des assistants, tout y est. Mais, chut ! Le premier numéro va sortir ; il se fait un grand silence. Le voici ! Une voix tonnante l’a proclamé ; il se transmet de bouche en bouche jusqu’à l’extrémité de l’amphithéâtre, tandis que de grands écriteaux l’affichent à tous les yeux. Chacun tient son carton à la main et pique les numéros sortis. Le premier terne, le premier quaterne, le premier quine s’annoncent aussitôt, et vont chercher leur argent sur l’estrade, au bruit des fanfares. Si quelque étourdi se trompe et réclame le prix sans l’avoir gagné, il revient à sa place au milieu d’un orage de sifflets. Le premier carton rempli gagne la tombola et mille écus.

Le gain n’est pas si gros dans les tombolas rustiques qui sont l’ornement obligé de toutes les fêtes de village ; mais pour cent écus, ou même pour cinquante, le gagnant témoigne autant de joie et le perdant autant de jalousie. Malheur à celui qui s’avise de gagner sans être de la paroisse On le reconduit à coups de pierre jusque chez lui, et son argent lui coûte cher.

Il n’y a pas très-longtemps que dans un village de la Sabine telle fortune échut à un paysan qui demeurait à trois lieues plus loin. Le vainqueur était un homme d’un certain âge, doux, patient, tranquille et flegmatique comme un Normand du pays de Caux. Il empocha l’argent