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Page:About - Rome contemporaine.djvu/218

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les sciences de notre siècle comme des inventions du démon. Au demeurant il est bon, doux, simple de cœur, plus malléable que la cire et plus blanc que la neige.

Lorsqu’on l’a vu grandelet, on lui a donné un cheval, une montre de Genève pendue à une chaîne de Mortimer ou de Castellani, un habit neuf taillé dans le dernier goût chez Alfred de Paris ou chez Poole de Londres. Il a pris l’habitude de faire des visites, de promener sa personne au Cours et au Pincio à l’heure où le beau monde s’y étale, de fréquenter les théâtres et les églises à la mode. Il s’est affilié à deux ou trois confréries religieuses dont il suit les réunions avec assiduité. Il n’a pas voyagé, il n’a rien lu, il a échappé aux passions, aux doutes et aux tumultes intérieurs de la jeunesse. Entre sa vingt-deuxième et sa vingt-cinquième année, la volonté respectable de son père l’a marié sans amour à une jeune fille de bonne maison qui sortait du couvent, aussi simple et aussi ignorante que lui. Il a des enfants, beaucoup d’enfants. Il les élève comme ses parents l’ont élevé lui-même. Il enseigne à l’aîné que ses frères lui doivent l’obéissance ; il apprend aux cadets qu’ils sont les très-humbles serviteurs de leur aîné. Il met ses filles dans le même couvent où leur mère a appris l’ignorance, il dit le chapelet en famille, tous les jours que Dieu fasse, et il demande au ciel la continuation d’un ordre de choses si heureux, si noble et si parfait.

Malgré tous les travers que l’éducation lui a donnés, il ne manque ni de bonté ni de grandeur. Il donne autant et même plus que ses ressources ne le permettent ; toutes les misères, réelles ou fausses, attendrissent son cœur et dénouent les cordons de sa bourse. Il ne connaît pas les