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Page:About - Rome contemporaine.djvu/23

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produise à Marseille, tout s’arrangera à l’amiable, et vous verrez cinquante liquidations tolérées pour une faillite déclarée. Est-ce bienveillance ou prévoyance ? compassion aux embarras du prochain ou retour sur soi-même ? Je n’ose me prononcer là-dessus. Toujours est-il qu’à Marseille un créancier aime mieux encaisser dix pour cent et se taire que de sévir contre son débiteur.

Il y a quelques années, un Marseillais qui avait fait fortune à l’étranger après quelques vicissitudes, légua son bien à sa ville natale et stipula que les revenus seraient employés à la délivrance des prisonniers pour dettes. On vit alors un légataire bien embarrassé : c’était le conseil municipal de Marseille. Il avait beau chercher des prisonniers pour dettes : on n’en faisait pas dans le pays. Peu s’en fallut que le legs ne fût réexpédié pour l’autre monde comme inutile, injurieux et incompatible avec les usages reçus. L’affaire en était là quand un bourgeois avisé dit à son voisin : « Fais-moi jeter en prison pour dettes ; on me délivrera sur le legs du bonhomme, et nous partagerons l’argent. » L’invention parut si sage que la prison trouva enfin quelques locataires. Elle n’en aurait jamais eu sans le legs du bon Marseillais.


Cette tolérance américaine, cette indifférence en matière de religion commerciale, a des inconvénients que je n’ai pas besoin de signaler. Cependant elle n’est pas sans quelques avantages. En lâchant la bride aux spéculateurs hardis, en rassurant les timorés, elle a accéléré le progrès de la ville et contribué à la prospérité de la France. Je