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Page:About - Rome contemporaine.djvu/270

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avec quelqu’un de notre monde, il me tuerait. » Comprenez-vous ? D’un côté, la misère ; de l’autre, la vanité. Le sens moral ? absent.

Voici un trait plus original. Un jeune homme de Lyon, chargé de représenter une maison de commerce, s’arrête à Rome et prend un logement dans le voisinage de la poste. Il reçoit la visite d’un entremetteur. Ces messieurs pullulent dans la ville, et lorsqu’on leur donne cinq francs, ils vous baisent la main. Mon Lyonnais, l’entremetteur aidant, prend une maîtresse. Elle était mariée à un postillon fort honnête homme, et beaucoup plus jaloux que le cordonnier de la rue F… Si elle donnait quelques coups de canif dans le contrat, c’était à l’insu du mari. Le Lyonnais fut prudent par nécessité. Il n’allait jamais chez sa maîtresse que lorsqu’il avait vu le mari sortir à cheval de la cour des postes. Il savait alors que la longueur du relais et la nécessité du service lui assuraient cinq ou six heures de parfaite sécurité. Un jour pourtant il fut pris. Le mari s’était bien mis en route en faisant claquer son fouet ; mais à moitié chemin il s’était senti indisposé. Un camarade qui revenait à Rome avait changé de chevaux avec lui. Bref, il rentra au logis sans être attendu, et son premier mouvement fut de tirer le couteau. Le Lyonnais s’expliqua, pria, raisonna, fit valoir sa qualité de Français, offrit en indemnité les cinq ou six écus qu’il avait sur lui. On finit par accepter ses raisons et son argent. « Habillez-vous, dit l’homme, mais si jamais vous racontez ce qui s’est passé aujourd’hui, si vous m’exposez aux railleries des personnes de ma classe, je jure de vous tuer, fussiez-vous en France et au pied des autels. Bon voyage !… ou plutôt non ; attendez-moi. Je vais avec