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Page:About - Rome contemporaine.djvu/271

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vous. » Il serra son couteau dans sa poche, enferma sa femme à double tour et sortit avec le Français plus mort que vif. Le pauvre garçon recommandait son âme à Dieu, bien convaincu qu’il n’avait pas dix minutes à vivre. Toutes les fois qu’il entrait dans une rue mal éclairée, il se disait : « C’est ici. » 11 arriva pourtant sans encombre à sa porte, et son terrible guide prit poliment congé de lui. « Ah çà ! dit le jeune homme étonné de vivre, pourquoi avez-vous pris la peine de me ramener à domicile ? » Le Romain répondit avec une bonhomie sublime : « La ville n’est pas sûre, et je craignais qu’il ne vous arrivât malheur. »

Le héros de cette aventure (c’est le Français que je veux dire) est aujourd’hui marié, père de famille et chef d’une des premières maisons de Lyon. Il n’a plus rien à craindre du couteau des postillons romains, et pourtant lorsqu’il raconte son histoire, il baisse la voix d’un ton et regarde machinalement si la porte est close.


J’ai connu un officier français, fort beau garçon, ma foi ! qui s’était logé en garni chez une belle femme de Rome. Le mari, domestique chez un cardinal, gagnait une cinquantaine de francs par mois ; la femme faisait le reste. Chose singulière ! cette créature avait conçu une véritable passion pour son amant. Elle lui faisait parfois des scènes de jalousie, et l’arrivée du mari ne lui fermait pas la bouche. « Pour Dieu ! disait le pauvre homme, laissez-moi donc souper en paix Si vous ne pouvez vivre sans vous quereller, n’avez-vous pas toute la journée à vous ? »