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Page:About - Rome contemporaine.djvu/47

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déboursé à propos. L’argent dépensé est le seul qui reste ; l’argent épargné finit toujours par disparaître. Les assemblées bourgeoises ne sont pas de cet avis, parce qu’elles sont de l’école de mon grand-père ; elles lésinent dans le présent, sans nul profit pour l’avenir. Panurge est peut-être allé un peu loin dans son royaume salmigondinois ; mais il y avait plus de raison dans le petit doigt de Panurge que dans tout le ventre d’un parlement.

L’habitude de rogner les budgets et surtout l’ajournement systématique des travaux reconnus nécessaires ont coûté très-cher à la France. Si le chemin de Paris à Marseille avait mis quelques années de moins à se construire, le port de Trieste n’aurait pas fait fortune à nos dépens. Les éclaircies qui se font rapidement dans les quartiers touffus de Paris auraient coûté moitié moins en 1758. Elles coûteraient dix fois plus, si un esprit de temporisation parlementaire les ajournait d’année en année jusqu’en 1958. Il suit de là que pour tous les travaux d’utilité ou de splendeur publique, rien n’est plus prudent que la hâte, et rien n’est plus économique que la dépense.

L’histoire, qui juge les gouvernements en dernier ressort, leur sait peu de gré des millions qu’ils ont mis à la caisse d’épargne. Elle considère Galba comme un ladre, et elle n’a pas Vespasien en odeur de sainteté. Les magnificences de Louis XIV, encore qu’un peu personnelles, ont laissé un meilleur souvenir que les lésineries de Louis XI. C’est pourquoi, si nous voulons être bénis de nos enfants et admirés de la postérité, dépensons tous nos revenus à des entreprises grandes et utiles : c’est le meilleur placement.