Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/176

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Quel spectacle ne présente pas cette assemblée, où l’esprit contemporain se retrempe aux sources des plus fortifiantes traditions ! Au palais de l’Institut que vous ouvrit l’empereur Napoléon, vous êtes demeurés ce que vos prédécesseurs furent au Louvre lorsque Louis XIV les y installa pour faire cortège à sa gloire. Dans ce pays où chaque génération vit pour elle-même et ne compte plus avec aucune autre, vous seuls avez encore des ancêtres et vous inclinez librement devant des règles que vous n’avez point faites. Pourtant, je puis le dire sans redouter aucune contradiction, jamais on ne s’est assimilé avec autant de bonheur les idées qui sont la vie de la France moderne, et les hommes qui en sont la gloire ; jamais le culte du passé ne s’est plus étroitement associé à l’intuition de l’avenir !

Personne n’a représenté cette intelligence de notre époque unie au respect des temps qui ne sont plus, d’une manière plus élevée que le savant illustre dont vous m’avez remis le soin de rappeler les travaux éclatants et la vie modeste. Peu d’années se sont écoulées, depuis que l’éloquent orateur assis à mes côtés esquissait à grands traits la carrière de M. Biot, et déposait en votre nom une dernière couronne sur sa tête octogénaire. Ce souvenir toutefois me rassure plus encore qu’il ne m’inquiète, car, s’il me laisse tout à craindre pour moi-même, il suffira du moins pour protéger la mémoire de mon prédécesseur contre la faiblesse de mes paroles.

M. Biot s’est trouvé placé sur la limite de deux mondes. Il avait vu tomber la société de nos pères, en conservant de ses mœurs les plus vivants souvenirs ; il fut plus tard, dans la plénitude de sa force intellectuelle, associé, pour la réorganisation de l’enseignement public en France, à la mis-