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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/180

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le Cotes du nouveau Newton, il vint à Paris présenter son premier Mémoire avec l’émotion d’un poëte qui apporterait sa première tragédie. M. Biot a raconté lui-même à l’Académie française l’histoire de cette communication, d’où la générosité de M. de Laplace fit sortir la fortune d’un professeur obscur. Discuté devant la classe des sciences, le Mémoire fut renvoyé à l’examen d’une commission dans laquelle siégeait le général Bonaparte, membre de l’Institut pour la section de mécanique, juge bienveillant, mais redoutable, dont le front réfléchissait alors les gloires de l’Italie et de l’Egypte, en s’éclairant des gloires prochaines du Consulat.

Vous vous souvenez de la scène charmante du lendemain, lorsqu’après un déjeuner où tous les convives félicitèrent à l’envi le jeune géomètre, M. de Laplace, conduisant celui-ci dans son cabinet, prit sous une liasse de vieux papiers un cahier de sa main dont l’écriture était jaunie par le temps ; vous savez que M. Biot y trouva le problème d’Euler résolu par la méthode qu’il croyait avoir découverte, et dont l’honneur lui fut d’ailleurs scrupuleusement maintenu. Noble désintéressement du génie, assez sûr de ses forces pour semer dans l’intérêt de la science, sans s’inquiéter de recueillir dans celui de sa vanité !

Sous un tel patronage, tout réussit à M. Biot, demeuré jusqu’à son dernier jour le plus respectueux comme le plus reconnaissant des disciples. Il fut nommé examinateur à l’École polytechnique, professeur au Collège de France, associé de l’Institut, dont il devint, avant l’âge de vingt-neuf ans, membre titulaire pour la section de géométrie. Chaque faveur était d’ailleurs précédée par un service rendu à la science, et, dès son début, cette carrière fut signalée par une