Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/189

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Quand deux voies sont aussi nettement indiquées, le choix semble moins difficile. Ce fut dans la route qui conduit aux célestes hauteurs que s’engagea l’étudiant, dont les notes, écrites le soir même, m’ont fourni le récit de cette bonne fortune de jeunesse.

La vie tranquille du professeur avait toutefois ses émotions, ses fatigues et ses dangers, car la science a comme la guerre ses champs de bataille, et M. Biot n’en désertait aucun. Personne n’ignore les péripéties de ce premier voyage aérien qu’il entreprit avec Gay-Lussac, périlleuse tentative qui concourut à redresser, au prix de hasards jusqu’alors sans exemple, les idées universellement admises au sujet de l’aiguille aimantée. Les gens du monde ne sont pas demeurés étrangers à l’histoire des pérégrinations scientifiques commencées en Espagne, poursuivies en Italie, et continuées jusqu’aux abords des mers polaires. Dans la première mission, confiée par le Bureau des longitudes à MM. Biot et Arago, les difficultés matérielles dépassaient encore celles de l’œuvre scientifique, si délicate que pût être celle-ci.

L’astronome Méchain, mort à la peine sur une plage inhospitalière, avait entrepris, avec Delambre, une nouvelle mesure de la terre d’après l’observation de l’arc compris entre Dunkerque et Barcelone. Il s’agissait de prolonger la méridienne jusqu’aux îles Baléares, opération qui contraignait de lier ces îles à la côte d’Espagne pour calculer, à l’aide de feux perdus dans la nuit et l’immensité, des triangles dont la base n’avait pas moins de trente-cinq lieues. Sur des rochers qu’osait à peine fouler le pied des pâtres, les missionnaires de la science luttèrent durant deux hivers contre d’innombrables obstacles, et le