Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/195

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d’harmonies puériles. Mais répudier les explications de la fatuité ignorante, défendre Dieu lui-même contre l’esprit qu’on se complaît à lui prêter, c’est garantir le système général des causes finales, et non pas le déserter ; c’est imprimer à l’univers son caractère véritable, celui d’une œuvre contingente, dont la compréhension absolue n’appartient qu’à la toute-puissance qui la conçut et l’enfanta. Les notes dont j’ai rappelé l’origine ont conservé le souvenir de débats fréquents engagés sur ces délicates matières au sein du Bureau des longitudes, débats dont M. Biot rapportait l’écho à son foyer domestique. Sur ces points-là seulement, il se permettait de contredire son illustre maître ; et peut-être lui a-t-il respectueusement opposé plus d’une fois ces vers de Voltaire qu’il aimait à citer :

… J’ai sur la nature encor quelque scrupule ;
L’univers m’embarrasse, et je ne puis songer
Que cette horloge existe et n’ait point d’horloger[1].

Mais, il faut le répéter, pour laisser à l’opinion de M. Biot toute son autorité scientifique, lorsqu’il soulevait au sein de l’Institut les questions astronomiques que je viens de rappeler, il apportait dans cette étude la plus entière liberté d’esprit. Vingt années s’écoulèrent encore avant que la noble intelligence qui avait tout connu et tout épuisé se reposât dans le christianisme des orages et des obscurités de la science.

Ce fut là le couronnement d’une longue vie consacrée à

  1. Cités par M. Biot dans les Recherches chimiques sur la respiration des animaux. (Mélanges scientifiques et littéraires, t. II, p. 23.)