Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/238

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sein de l’exil, des cachots, de la détresse ; et néanmoins il aborde d’un esprit libre et avec un cœur serein la carrière nouvelle qui s’ouvre devant lui.

Je n’ai pas à raconter, Messieurs, les travaux multipliés auxquels il se livra dans ses fonctions de maître des requêtes. L’empereur sut les apprécier par lui-même et le fit conseiller d’État au mois de février 1810. Quelques mois plus tard, il le nommait préfet de police à Paris.

Je ne puis passer sous silence un bruit que ses ennemis répandirent à cette occasion et auquel il a toujours opposé une dénégation absolue. On racontait que l’empereur, avant de le nommer, avait eu avec lui une conversation particulière afin d’éprouver son dévouement. Si un prince de la maison de Bourbon était découvert à Paris, quelle conduite tiendrait-il ? Le ferait-il arrêter ? Membre d’une commission, le condamnerait-il ? M. Pasquier aurait répondu : Sire, je ferais mon devoir. Voici ce qu’il raconte dans un récit qui est empreint de tous les caractères d’une parfaite sincérité : «Napoléon était seul quand je fus introduit dans son cabinet, et notre conversation s’est passée jusqu’à la fin sans témoins. Non-seulement il ne me fit subir aucune épreuve, mais il évita au contraire de me rien dire qui pût susciter en moi une pensée de cette nature. Il alla au-devant de tout ce qui pouvait m’effaroucher. Je lui représentai que, étranger aux hommes et aux intrigues de la révolution, j’étais fort peu propre à des fonctions qui devaient supposer une connaissance approfondie de ces antécédents ; il me dit que cela regardait le duc de Rovigo, ministre de la police ; que ce qu’il me demandait, et ce qu’il attendait de moi, c’était de rétablir la préfecture de police sur le