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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/273

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Combien de contrastes intéressants dans cette physionomie complexe et originale que j’essaye, à mon tour, de reproduire, sans espérance de répondre à l’impression, encore vive, à l’idée toujours présente qu’en ont gardées l’affection filiale, l’amitié, l’intelligente sympathie du monde, les souvenirs de la confraternité académique !

M. Pasquier pouvait être revendiqué à la fois par les deux régimes qu’a séparés la révolution de 1789. À notre ancienne société le rattachaient son origine, son éducation, sa vocation première, ses amitiés, ses relations de jeunesse, certains principes communs de gouvernement et d’administration, la communauté de malheurs dans lesquels il lui avait été fait une part si douloureuse, tout un ensemble d’idées et de sentiments dont il avait reçu, au début de sa vie, l’empreinte ineffaçable. Toutefois il n’avait pas été en vain le témoin curieux et attristé des fautes sous le poids desquelles devait succomber cette société. La société nouvelle comptait peu de membres plus convaincus de ce qu’il y avait eu dans son avènement d’inévitable, de définitif, plus instruits par l’expérience et la réflexion de ses besoins présents, de ses conditions d’existence, de ses dangers. Il habitait, en politique, comme une région moyenne entre des opinions contraires, celles que flattait l’espoir chimérique d’un retour aux choses du passé, celles qui lui semblaient s’élancer avec trop d’impatience vers un avenir inconnu. De là, dans le concours indépendant qu’obtenaient de lui les partis, des résistances quelquefois importunes à ce que leurs passions ou leurs systèmes avaient de trop absolu ; de là ces vues modérées, ces conseils pratiques, ces ménagements habiles, inspiration de sa facile, attrayante, persuasive élo-