Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/274

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quence, cause de sa constante action sur la direction des affaires.

Il y a deux choses qui ne s’allient pas toujours et qu’il a été donné à M. Pasquier de concilier : le labeur de l’homme d’État et le commerce du monde. Il était né dans un temps, il avait vécu dans une société, où l’on plaçait au premier rang des plaisirs et, quelquefois, des occupations la fréquentation de cercles élégants et polis, des conversations mêlées de sérieux et d’agrément, dont les questions du moment et ce qui en était alors voisin, la littérature, fournissaient surtout la matière. Jamais M. Pasquier, même dans les jours les plus occupés, au milieu des soins les plus graves de sa vie publique, ne négligea ce qui avait été la plus chère distraction de sa jeunesse et le précieux complément de son éducation. Il rechercha les salons où s’était perpétué l’art de converser ; il se plut à l’entretenir dans le sien ; lui-même y excellait par la solidité et les grâces d’un esprit qui se prêtait avec souplesse à tous les accidents de l’entretien et y introduisait, dans le langage le plus aisé et la mesure la plus parfaite, de graves considérations politiques, de fines observations morales, force souvenirs pleins d’à-propos et, en toutes choses, des appréciations toujours justes.

Ce n’est pas ici qu’il pourrait être mis en oubli que les sujets littéraires avaient pour cette intelligence habituellement occupée de questions législatives, de gouvernement, d’administration, mais dont l’habitude n’enchaînait point la liberté, un attrajt particulier. Il aimait à s’y engager, et l’on s’apercevait alors que son goût avait toute la sûreté de son discernement politique. Rien d’étroit, d’ailleurs, dans ses jugements : ses préférences naturelles et très-vivement exprimées