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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/33

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plus populaire la chaîne brisée de nos institutions, et il mit à cette œuvre un courage et une habileté qui méritaient de réussir ; mais cette monarchie diminuée retrouva devant elle les mêmes difficultés qui avaient accablé sa devancière. Le trône second tomba. M. de Tocqueville n’avait compté ni parmi ses adversaires, ni parmi ses défenseurs. Il demandait, avec l’opposition victorieuse, une chambre élue plus indépendante, et un corps électoral plus incorruptible ; mais il ne parut qu’à la tribune et jamais sur la place publique, appelant de sa voix les réformes, et refusant tout signe à la révolution qui se préparait.

La république, néanmoins, l’admit dans ses conseils, d’abord comme député, puis comme ministre des affaires étrangères. Il apporta, dans cette nouvelle phase de son existence politique, un esprit sans illusions ; car il ne croyait pas que la France, qui avait méconnu les conditions de la liberté sous deux monarchies, fût capable de la servir, ou même de la sauver, sous une république. Le nom était nouveau, la situation était la même. Aucun progrès ne s’était accompli dans la sphère générale des intelligences, sauf un petit nombre d’hommes éminents à qui la grandeur du péril avait révélé la grandeur des fautes, et qui s’unirent pour donner au pays la première liberté civile dont il eut joui jusque-là, la liberté de l’enseignement. Ce fut un éclair sublime dans une nuit orageuse.

Il y en eut un autre.

Le rénovateur de la liberté de l’Italie, le prince qui, dès son avènement au trône, avait promis volontairement à son peuple des institutions généreuses, et mérité de l’Europe entière un applaudissement qui retentira jusqu’à la dernière