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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/357

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Je me reprocherais de ne pas citer encore, à propos de Milasseau, une petite note que je trouve à la fin du rapport qui le concerne : « Les signataires de cette demande affirment qu’elle a été faite à l’insu de Milasseau. »

J’ai mis le second prix avant le premier prix, l’éclusier Milasseau avant Mlle Guittaud, de Chambéry, parce que je m’attache surtout à rapporter les conversations de l’Académie, et que, dans ces conversations, le dévouement ardent de Milasseau nous a servi d’argument pour prouver à quelques-uns de nos confrères que nous n’avions pas de préférence exclusive et que tous les dévouements nous sont également précieux. La vertu de Mlle Guittaud ne mérite pas moins, en effet, notre admiration que la vertu de Milasseau. Mlle Guittaud a consacré sa fortune tout entière à fonder à Chambéry une maison de refuge, sous le nom du Bon-Pasteur, qui a servi d’asile à un grand nombre de jeunes filles. Cette maison dure depuis trente ans. Une autre maison du même genre a été fondée à Annecy par les soins de Mlle Guittaud. On ne peut lire sans émotion, dans les récits qui nous ont été adressés de la vie de Mlle Guittaud, comment, grâce à sa charité aussi ardente que persévérante, elle était devenue en Savoie une sorte de puissance et d’autorité, que l’annexion s’est bien gardée de supprimer ou d’affaiblir. Tous les malheurs de tout genre avaient recours à Mlle Guittaud. Pendant les troubles du Piémont, c’est elle qui secourait les condamnés politiques du temps ; c’est elle qui, dans un esprit tout chrétien, et que les partis respectaient, tâchait d’obtenir la grâce des vaincus du jour, et, quand elle ne pouvait pas décider le vainqueur à pardonner au vaincu, alors elle s’employait à consoler les derniers moments du vaincu et à obtenir des