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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/377

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riture des ouvriers ! Elle a dirigé ainsi, pendant plusieurs années, tout un atelier de travail à ses moments perdus : et entre les épargnes qu’elle a réalisées et les souscriptions qu’elle s’est procurées, on n’estime pas à moins de dix mille francs le profit que vaut à la commune cet architecte d’un nouveau genre. A Peyreleau, petit endroit perdu dans les montagnes du Rouergue, ce sont ses connaissances médicales et même son aptitude manuelle aux opérations de chirurgie qui sont constamment mises à profit. On cite des guérisons difficiles dues à son habileté autant qu’à ses soins. Pour passer d’ailleurs de La Capelle à Peyreleau et s’éloigner du lieu où elle était adorée, Jeanne Mialaret n’avait pas eu d’autre raison à donner, si ce n’est qu’elle ne s’y sentait plus nécessaire, une communauté religieuse, à laquelle elle-même a fait don de son mobilier, étant venue se charger de consacrer par un esprit de durée et de suite toutes les fondations que son génie inventif avait créées ; Jeanne Mialaret n’est qu’un missionnaire, et ne se charge que d’ouvrir les voies.

En ce moment, comme si sa tâche était finie, elle vient elle-même de prendre le voile ; et c’est sous le nom de sœur Saint-Charles qu’elle reçoit maintenant les bénédictions des populations qu’elle a tirées de l’indigence ou de l’ignorance. Mais ce n’est point sous ce nom que l’Académie veut la connaître ; c’est à l’institutrice libre et laïque, n’ayant pris de conseil que d’elle-même, et n’obéissant à d’autre règle que son dévouement, non à la sœur religieuse, qu’une médaille de mille francs est attribuée. L’Académie sait bien qu’elle aurait trop à faire et aurait trop vite épuisé ses ressources, si elle voulait faire pénétrer son admiration avec ses récom-