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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/389

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Comme institutrice, elle ne s’est pas ralentie un seul jour durant ce long espace de temps. Ses heures de classe sont pour elle sacrées : ce sont les seules qu’elle n’ait jamais cru pouvoir sacrifier au soin des infirmes et au service des malades. Demandez-lui le sacrifice de ses repas, de ses jours de congé, de ses nuits, elle les accorde, elle les prodigue avec joie ; mais ses heures de classe, elle n’y touche jamais. C’est au point qu’après huit ou dix nuits, et quelquefois plus, passées au chevet des malades, elle a toujours trouvé assez de force et d’énergie pour ne pas prendre, ne fût-ce qu’un quart d’heure, de repos sur le temps dû à l’école. La classe, c’est pour elle la tâche stricte, le devoir rigoureux.

Sa charité pourtant s’y sentait à l’étroit, et dès les premiers temps de son installation dans la commune, elle s’annonça pour ce qu’elle devait être toute sa vie ; elle devint la sœur de charité ordinaire, une infirmière de bonne volonté, au service de tous. On s’y est vite accoutumé autour d’elle, et dès que dans une famille pauvre il éclate une affliction soudaine, dès qu’une maladie se déclare, le premier mot est : « Vite, allez chercher la maîtresse. » Avec elle arrivent la consolation et le secours.

Ici le Mémoire très-bien fait que j’ai sous les yeux, et qui émane évidemment d’une plume distinguée autant que d’une belle âme, a cru devoir entrer dans des détails précis, circonstanciés, sur les rebuts et les dégoûts inhérents à la pratique de la charité : je me garderai de le suivre. Nous sommes pour cela trop délicats. Oh ! la charité, c’est un beau mot à prononcer, une belle chose à célébrer un jour de fête en Académie ; mais les conditions habituelles, journalières, la réalité et le matériel, si j’ose dire, de la charité, y pense-