Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/464

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toire en France, par M. Caboche, inspecteur de l’Académie de Paris. On peut l’appeler, il est vrai, une œuvre de critique littéraire, encore plus qu’une œuvre d’histoire. Mais l’esprit des deux vocations s’y retrouve, et l’un sert à l’autre. Savant et très-classique de goût, l’auteur, après une introduction élégante sur l’ensemble du sujet qu’il se propose, et quelques vues sur les Mémoires dans l’antiquité grecque et romaine, entreprend, à partir de notre plus ancien moyen âge, et suit, à travers nos trois grands siècles jusqu’à nos jours, une étude attentive de nos Mémoires français, où je le crois tenté de voir surtout notre histoire.

La vie des auteurs mêlée à leurs récits, leur degré de passion et par-là d’éloquence, les conditions diverses de ces témoins, depuis le vieux maréchal Villehardouin ou le troubadour Froissart, jusqu’au terrible Montluc, au cardinal de Richelieu, et à quelque éloquent ministre parlementaire d’une époque récente, c’est là sans doute une heureuse variété de tableaux. Elle comprend encore bien des noms, deux surtout qui nulle part n’ont, été mieux étudiés, celui du narrateur trop mêlé dans l’action et trop partial de souvenir, le cardinal de Retz, et celui du spectateur inexorable qui, pour avoir été toujours inactif, n’en était pas plus patient et plus calme, le duc de Saint-Simon. Ces juges sévères, interrogés à leur tour, ces peintres dessinés avec des touches quelquefois dignes d’eux, d’autres portraits encore, depuis le politique Commines jusqu’à la sincère Mme  de Motteville, et depuis Sully jusqu’à Mme  Rolland, font de cet ouvrage une instructive et piquante lecture, un livre bien pensé et bien écrit. Ce livre, que l’auteur peut augmenter de quelques noms et de nouveaux détails, est bien placé dans un con-