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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/497

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XVIe siècle », touchant encore à l’Italie par le val d’Aoste, asile de Calvin, est surtout destiné à écarter du célèbre sectaire français le reproche d’inflexible rigueur. Si l’auteur n’a pu effacer le nom de Michel Servet, il fait cependant ressortir de la vie privée de Calvin, de ses amitiés, de ses lettres quelques graves et bien honorables témoignages. Nul ne doit regretter cette justice rendue. Mais l’auteur devait-il oublier, ou peut-il supprimer, en les oubliant, les injures trop mêlées par le réformateur à ses raisonnements, et parfois si funestes à ses adversaires et à la liberté religieuse qu’il immolait lui-même, par leur proscription ? Près de ce travail, où le blâme dû aux erreurs même de ceux qu’on admire, n’est pas assez exprimé, mais qui respire d’ailleurs un sentiment d’équité dans le zèle, l’Académie place un autre écrit animé de cette jalousie de liberté religieuse dont s’honore notre temps, c’est le neuvième volume de l’Histoire d’Espagne y de M. Rosseuw Saint-Hilaire, racontant les tyrannies d’inquisition et de guerre de Philippe II contre les Pays-Bas et la Hollande.

L’Académie partage entre ce récit d’une éloquente véracité et les intéressantes études d’histoire, de M. Jules Bonnet, le prix de cette année, pour un ouvrage de haute littérature. Rien ne répond mieux à ce titre que de savants et libres témoignages rendus avec talent à l’esprit de tolérance, sous la condition surtout que cette tolérance soit générale, autant que sincère, qu’elle reconnaisse partout, dans certaines limites, des droits supérieurs à la force, et, dans l’ordre spirituel, une autorité religieuse d’autant plus inviolable qu’elle est plus désarmée.

Honorons cet esprit sous toutes les formes, dans l’époque