Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/97

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tions nouvelles une de ces renommées précoces qui lui inspirent à la fois espoir et sécurité, elle se garde bien de la faire trop attendre. C’est sa force et sa vie, que ces jeunes recrues. Son privilège est de confondre dans une égalité parfaite non-seulement les illustrations, les conditions les plus diverses, mais les âges les plus différents ; et si jamais cette heureuse rencontre d’une jeunesse déjà mûre devait lui sembler désirable, c’était pour compenser l’absence d’un confrère aimable et regretté, qui conservait, au seuil de la vieillesse, l’ardeur et la vivacité d’un esprit de vingt ans.

Qui mieux que vous, Monsieur, pouvait occuper sa place ? Sur bien des points, sans doute, vous différez de lui : vous avez fait de moins nombreux voyages dans ce champ des fictions dramatiques que comme lui vous parcourez : vous y suivez une autre voie, vous y cherchez d’autres effets, un autre but, et votre nom, bien qu’il ait acquis promptement une célébrité véritable, n’a pas, comme le sien, durant plus de trente ans, retenti chaque soir sur presque tous les théâtres de l’Europe et du monde ; mais vous avez avec lui bien plus qu’un trait de ressemblance, un trait de fraternité ; il a su rester populaire, vous avez su le devenir, sans jamais vous être exposé, je ne dis pas à rougir de vous-même, à poursuivre de honteux succès, non, à manquer seulement aux moindres exigences de la morale et du bon goût. Aussi, lorsque tout à l’heure vous racontiez à quelles sources honnêtes et parfois généreuses M. Scribe puisait sa popularité, lorsque vous rappeliez cet amour de la règle, du bien, du bon exemple, qui, dans ses créations même les plus légères, se manifeste à tout propos, je me disais qu’à votre insu vous nous parliez de vous-même, et confirmiez devant