Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/433

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rent ensemble. Dumas, d’abord plein d’entrain, résista mal aux privations et à la fatigue. Au bout de quelques mois, il demanda l’autorisation de rentrer en France et quitta l’Égypte, brouillé avec Bonaparte. Forcé de relâcher à Tarente, il y fut retenu deux ans prisonnier. Pendant cette captivité — aussi dramatique que celle de Monte-Cristo — où il déjoua des tentatives d’assassinat et d’empoisonnement, sa santé s’était gravement altérée. Mis en non-activité à son retour en France, il se réinstalla à Villers-Cotterets où, en 1792, entre deux campagnes, il avait épousé Élisabeth Labouré, fille de l’hôtelier de l’Écu. Ce fut de cette petite ville que, le 24 juillet 1803, il écrivit au maréchal Brune, son ami :

Mon cher Brune

,

Je t’annonce avec joie que ma femme est accouchée hier matin d’un gros garçon, qui pèse neuf livres et qui a dix-huit pouces de long. Tu vois que s’il continue de grandir à l’extérieur comme à l’intérieur, il promet d’atteindre une assez belle taille…

Le garçon qui, dès sa venue au monde, donnait de si belles promesses, devait devenir l’auteur d’Henri III, d’Antony et des Trois Mousquetaires. Il tint donc ces promesses « à l’extérieur et à l’intérieur », selon l’expression du général, physiquement et intellectuellement. Je n’ai pas ici à conter son histoire ni à étudier son œuvre. Son histoire fut longtemps celle d’un prince de féerie ; son œuvre, Alexandre Dumas fils l’a lui-même magistralement caractérisée dans une de ses éloquentes préfaces, et je ne saurais mieux faire que de