Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/440

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L’affaire Clémenceau, on est obligé de faire quelques réserves. On ne trouve pas dans ces œuvres cette unité et cette maîtrise de composition qui sont l’une des qualités dominantes du théâtre de Dumas fils ; l’étude des mobiles qui déterminent les actes des personnages y est parfois remplacée par des dissertations d’auteur. En revanche, quand on arrive aux situations vraiment dramatiques, l’admirable artiste doué pour la scène reparaît ; le dialogue se précipite, net, sobre, incisif, et le lecteur, fortement secoué, est entraîné dans un courant d’émotion irrésistible.

Ce fut La Dame aux camélias qui fournit à Alexandre Dumas l’occasion de débuter sérieusement au théâtre. Un ancien directeur de l’Ambigu, Antony Béraud, lui conseilla de tirer une pièce du roman où il avait conté la mélancolique histoire de Marguerite Gautier. Il se mit au travail, sans faire ni plan, ni scénario, allant tout droit devant lui, emporté par son émotion personnelle. La pièce écrite, il la lut à son père qui, enthousiasmé, lui sauta au cou en pleurant et lui promit de la faire jouer au Théâtre-Historique dont il était le directeur. Malheureusement, le Théâtre-Historique fut forcé de fermer ses portes quinze jours après la lecture aux comédiens et Alexandre Dumas, bien qu’il fût le fils du premier auteur dramatique de l’époque, eut à subir comme un inconnu les rebuffades, les dégoûts et les angoisses qui attendent les débutants. Méfiance des directeurs, interdictions de la censure, mauvais vouloir des acteurs, aucune épreuve ne lui fut épargnée. Enfin, La Dame aux camélias, reçue au Vaudeville, entra en répétition. Les interprètes n’avaient pas confiance, et,