Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/102

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– Il est libre, madame. Vous avez douté de ma parole ; je ne vous ferai pas l’outrage de douter de la vôtre.

La main de Belle-Rose s’ouvrit, et le page courut vers sa maîtresse.

– C’est un hardi et beau jeune homme, vraiment ! s’écria la dame. Sur mon âme, voilà un jeune soldat à qui l’épaulette de capitaine siérait à merveille ! Franc et ferme comme l’acier.

L’inconnue ne prit pas cette fois le soin de déguiser le son de sa voix, son éclat et sa douceur infinie charmèrent Belle-Rose, comme les vibrations sonores de la harpe. Il l’écoutait encore qu’elle ne parlait plus, et son cœur eut la révélation mystérieuse de l’amour sans bornes que cette femme devait inspirer, et du malheur sans remède qui suivait son abandon. Il venait de comprendre le muet désespoir de M. d’Assonville.

– Belle-Rose, attendez, reprit-elle ; vous serez libre dans un instant.

La dame au masque et le page se parlèrent bas durant quelques minutes ; puis celui-ci, approchant une petite table d’ébène sur laquelle se trouvait du papier, présenta une plume à sa maîtresse, qui écrivit une lettre, la plia sous enveloppe, appuya une bague qu’elle avait au doigt sur la cire brûlante et tendit la dépêche à Belle-Rose.

– Voici ma réponse, remettez-la à M. d’Assonville promptement, et oubliez tout, jusqu’au chemin que vous avez pris pour venir ici. Mais si quelque jour les hommes vous manquaient, frappez hardiment à la porte de la rue Cassette et nommez-vous : une femme se souviendra.

Belle-Rose s’inclina sur la main de l’inconnue et prit la lettre en effleurant de ses lèvres le bout d’un gant parfumé.

– Que Dieu vous garde ! beau cavalier, dit-elle à mi-voix ; et jetant sur Belle-Rose un dernier regard, elle disparut sous une portière.

– Venez-vous ? reprit le page, tandis que Belle-Rose,