Aller au contenu

Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dans l’ombre épaisse que projetaient les grands chênes, l’autre était toute baignée d’une blonde lumière ; un silence profond enveloppait la clairière et le parc. Plus rapide que la pensée, le premier regard de Belle-Rose embrassa l’étendue de la pelouse ; sur la ligne tremblante où l’ombre se mariait à la lumière, le corps d’un homme était couché. Une épée nue brillait dans l’herbe. Belle-Rose s’agenouilla près du corps ; le sang sortait de deux blessures béantes, l’une à la gorge, l’autre en pleine poitrine. À la vue de ce corps immobile dont le regard morne se tournait vers le ciel, Belle-Rose frissonna ; il se pencha, et soulevant la victime entre ses bras, il attira sa tête sous les rayons de la lune. Un cri d’horreur jaillit des lèvres du soldat… il venait de reconnaître M. d’Assonville.


Le coup de pistolet tiré par Belle-Rose avait réveillé quelques gardes ; ils accoururent et trouvèrent celui qu’ils appelaient M. de Verval occupé à étancher le sang d’un homme qui semblait mort déjà, tant il était immobile et froid. Deux d’entre eux couchèrent le blessé sur un brancard, un autre courut chercher un chirurgien, et Belle-Rose, aussi pâle que M. d’Assonville, le fit déposer dans ce même pavillon où, dans les terreurs d’une nuit d’incendie, Mme de Châteaufort et lui s’étaient rencontrés. Quelques tressaillements convulsifs indiquaient seuls que M. d’Assonville n’était pas mort encore. La marche avait rouvert les plaies, et le sang s’échappait sur le satin du sofa. La douleur de Belle-Rose était calme, mais effrayante à voir. Quelques larmes tombaient goutte à goutte de ses paupières. Lui qui aurait payé de sa