Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/155

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– Vraiment ! répondit Belle-Rose en affectant une grande surprise.

– Le capitaine a tout appris. Quelque méchant artilleur nous aura entendus ! J’avalais ma soupe lorsqu’un canonnier de planton est venu de la part du capitaine m’ordonner de me rendre à l’instant chez lui. Je pars. À peine sommes-nous seuls, que M. de Nancrais me fait signe d’approcher. « Je sais tout », me dit-il. À ces mots je me trouble et balbutie une réponse à laquelle je ne comprenais rien moi-même. « Paix, reprend-il. Je n’ai pas de preuves, tu ne passeras donc pas devant un conseil de guerre ; mais pour t’ôter l’envie de recommencer, je t’envoie à la salle de police. Tu y resteras trois jours… Si tu n’étais pas un bon soldat, je t’aurais fait goûter des verges… Prends ceci et marche. » Je sors tout étourdi et trouve dehors trois canonniers qui me ramènent ici… Pendant la route, j’examine ce que le capitaine m’avait mis dans la main : c’était une bourse où j’ai compté une douzaine de louis… La salle de police et de l’or, tout à la fois, je n’y comprends plus rien. Le sergent qui m’a remplacé dans le commandement du poste m’a permis d’entrer un instant… Quelle aventure !

– Il ne faut point s’en désoler… Nous n’aurions pas réussi.

– Bah ! la nuit est noire et les jambes sont bonnes !

– J’aime mieux te voir en prison… Tu risquais ta vie et je ne tiens pas à la mienne.

– Ce soir, c’est possible ; mais demain !… Tenez, je ne m’en consolerai jamais.

Un coup de crosse appliqué à la porte l’interrompit.

– On me rappelle, dit la Déroute… Déjà !

Il se leva et fit deux tours dans la chambre. Un second coup de crosse l’avertit de se hâter.

– Bon ! s’écria-t-il, voilà mes trois canonniers qui ont peur de s’enrhumer ! Adieu, sergent.

– Veux-tu m’embrasser, mon ami ?