Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/254

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– Eh ! du diable ! cria-t-il du plus loin qu’il vit Belle-Rose, ne pourriez-vous marcher plus vite ?

– Et toi, dit l’autre, ne pourrais-tu rester plus loin ?

Tous deux s’éloignèrent rapidement ; mais, au bout de cent pas, Belle-Rose sentit trembler le sol sous leurs pieds.

– À terre ! cria-t-il à la Déroute.

Et, le saisissant par le bras, il le força de se coucher près de lui dans un pli du terrain. Une épouvantable détonation retentit aussitôt ; un nuage de poudre obscurcit le jour, et mille éclats de pierre tombèrent autour d’eux. Quand ils se relevèrent, vingt toises du mur étaient à bas ; le fossé était comblé par les débris et une large brèche ouverte au flanc du bastion. La garnison avait décampé. Un corps de soldats que M. de Nancrais tenait en réserve s’élança aussitôt que la mine eut joué, et s’installa sans coup férir dans le fort, où le drapeau blanc fut arboré. M. de Luxembourg se porta en avant suivi de ses officiers. Comme il passait, il rencontra Belle-Rose qui courait vers le rempart, ses habits en désordre et tout couvert de poudre.

– Ah ! c’est vous, Grinedal ? dit M. de Luxembourg ; arrêtez-vous une seconde pour me dire le nom du soldat qui a mis le feu à la mèche.

– Eh ! s’écria la Déroute, ce soldat est un officier.

– Ah !

– Et cet officier, c’est mon lieutenant.

M. de Luxembourg tendit la main à Belle-Rose.

– Ce sont de ces actions qui ne m’étonnent pas, venant de vous : j’en parlerai ce soir à Sa Majesté, lui dit-il.

Le gouverneur de Tournai, voyant la ville démantelée, envoya un parlementaire au camp ; la capitulation fut signée, et la ville ouvrit ses portes. Ce premier succès excita la joie de l’armée, qui ne parlait de rien moins que d’aller d’emblée jusqu’à Bruxelles. Vers le soir, et comme la ville retentissait de chants, une ordonnance