Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/301

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Tout cela avait pris moins de temps pour être fait qu’il n’en faut pour le raconter. Belle-Rose et la Déroute se blottirent derrière le mur, et Cornélius, qui avait saisi au vol le projet du sergent, s’élança au-devant de Bouletord. La maréchaussée arrivait au galop, Bouletord en tête, la face rouge, l’œil enflammé.

– Hé ! monsieur, s’écria Cornélius, aussitôt qu’il fut à portée d’être entendu, un méchant drôle de postillon vient de renverser mon carrosse, ne pourriez-vous point m’aider à le relever ?

Bouletord regarda du côté du petit chemin. Les chevaux attelés avaient la tête tournée de son côté ; Cornélius, avec son habit d’uniforme, était debout sur le côté de la route ; il n’eut aucun soupçon.

– On verra au retour, mon gentilhomme, dit-il ; et, piquant des deux, il passa comme la foudre avec ses gens.

Belle-Rose et la Déroute sortirent de leur cachette. La Déroute riait de tout son cœur.

– Décidément, dit-il, ce pauvre Bouletord n’est pas fait pour le métier qu’il remplit ; c’est un agneau.

– C’est assez joli ce que tu as trouvé là, reprit Cornélius ; seulement, s’il m’eût reconnu il me tuait roide.

– Sans doute, mais il ne devait pas vous reconnaître, et il ne vous a pas reconnu.

– Poussons donc en avant.

– Non pas. Si Bouletord est un agneau pour l’intelligence, cet agneau a des oreilles. Au prochain relais, on lui dira qu’on n’a vu ni carrosse ni cavalier, il retournera sur ses pas, et il nous surprendra au beau milieu de la route ; ce serait mal finir ce qu’on a bien commencé.

– La Déroute a raison, dit Belle-Rose : laissons courir Bouletord et poussons sur la gauche.

Or, après l’évasion de Belle-Rose aux environs de Villejuif, voici ce qui était arrivé : on sait que l’exempt et ses deux acolytes étaient restés dans la voiture, dont