Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/396

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regardé tous les apprêts sans souffler mot ; voilà d’un petit vin de Suresnes dont vous me direz des nouvelles, et une gibelotte comme on n’en mange guère à la table du roi.

Ambroise s’assit, allongea ses grandes jambes et vida son verre d’un trait.

– Ah ça, camarade, dit-il en faisant claquer sa langue, vous qui me connaissez si bien, faites au moins que je vous connaisse un peu.

– C’est juste, reprit la Déroute ; je suis, moi aussi, un Patu.

– Ah bah !

– Oh ! mon Dieu, oui ! mais un Patu d’une autre branche, un Patu de Soissons, cousin de Jérôme Patu votre oncle.

– C’est toujours de la famille, qu’on soit de Beaugency ou de Soissons.

– Certainement, le nom est tout, le pays n’y fait rien ; je disais donc que je suis un Patu, Antoine Patu, dit Patu Blondinet.

– Voilà un drôle de sobriquet.

– Oui, assez drôlet. Ça me vient de la couleur de mes cheveux.

– À ce compte-là, moi aussi je pourrais être un Blondinet, dit Ambroise en riant.

– Ça ferait deux Blondinet dans la famille, répondit la Déroute, qui remplissait toujours le verre d’Ambroise Patu. Or, quand mon cousin Jérôme a eu connaissance de votre arrivée, il m’a dit comme ça : Antoine, mon ami, va au-devant du petit neveu, et quand tu l’auras bien traité, fais-lui bien vite reprendre le chemin du pays.

– Comment ! du pays ? s’écria Ambroise en laissant tomber sa fourchette.

– À moins qu’il ne lui plaise de se faire moine, a-t-il ajouté.

– Mais il m’a fait venir pour être jardinier, et non