Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/102

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Renaud avait des envies folles de mordre ce docteur infernal ; il se contentait de lui demander sérieusement s’il était le fils de Mathéus ou son père, son petit-neveu ou son aïeul. Il prétendait que leurs nez étaient cousins germains.

Un matin Mathéus parut dans la chambre de Renaud. Le carreau était couvert de morceaux de papier de toutes grandeurs sur lesquels on voyait le portrait hideux du maître de Rabennest.

— Soyez prudent, mon doux seigneur, s’écria Renaud ; si vous marchiez sur ces chères images, ce serait mettre le pied d’un bouc sur le museau d’un loup… Quel deuil pour votre âme !

Mathéus s’inclina.

— Monsieur le marquis, dit-il, le seigneur Jean de Werth se lasse de vous héberger avec cette somptuosité… un palais et un régal de prince… c’est trop… S’il ne vous plaît pas de signer cette renonciation de bonne grâce, il va se voir contraint d’employer contre vous des moyens qui répugnent à ma douceur.

— Prenez garde ! si l’attendrissement vous gagne, vous allez grimacer encore plus que de coutume… et ce sera épouvantable !

Mathéus fit un signe, deux valets saisirent Renaud par les bras, l’assirent sur un escabeau et passèrent une corde autour de ses poignets. La corde était assujettie par un bâton.

— Voulez-vous signer ? demanda Mathéus.

— Eh ! eh ! dit Renaud, je crois, Dieu me pardonne, que le côté gauche de votre joli visage est encore plus contrefait que le droit ! c’est une gageure.

— Tournez ! cria Mathéus.

Les deux valets firent tourner le bâton autour duquel la corde