Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/259

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de toutes parts. Il y avait une sorte de fièvre sombre et d’ardeur sauvage du côté des Impériaux, un entrain chevaleresque du côté des protestants ; les plus jeunes chantaient ; M. de Collonges n’épargnait ni les coups ni les chansons ; Renaud faisait rage ; il y avait si longtemps qu’il n’avait eu l’occasion d’invoquer sainte Estocade !

Les gens de Patricio Bempo plièrent enfin ; un rang se rompit, puis un autre, et un escadron entier se débanda. Un cri de victoire s’éleva du milieu des huguenots, mais Jean de Werth y répondit par une charge désespérée.

Fatigué de le voir sans cesse ramener à l’assaut les vieilles compagnies qui le suivaient, Magnus voulut rompre cette furie par un coup décisif. Il prit avec lui M. de Saint-Paer et trente dragons, sortit du village par une ruelle écartée, gagna la plaine sans être vu, et tomba, avec la force d’un torrent qui rompt ses digues, sur le flanc des Impériaux.

Cette fois, pris en tête par M. de la Guerche, de côté par Magnus, ébranlé en outre par le mouvement des fuyards qui se jetaient sur lui, Jean de Werth céda.

— Haut l’épée et tombons dessus ! cria Armand-Louis.

Les dragons chargèrent à fond de train, et les Impériaux écrasés plièrent comme un arbre qu’un vent d’orage couche sur le sol.

Au cœur même de la sanglante mêlée, Magnus rencontra Patricio.

— Encore ! s’écria-t-il.

Patricio n’attendit pas son attaque et fondit sur lui : Magnus para le coup, riposta, et la pointe rouge de Baliverne disparut dans la gorge de l’Italien, qui tomba sur la croupe de son cheval. L’animal fit un écart, et Patricio Bempo, vidant les arçons, roula par terre lourdement.