Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Alors, monsieur, obéissez. Ce n’est plus l’ami qui parle, c’est le capitaine.

Et comme M. de Saint-Paer attristé fronçait le sourcil, Armand lui saisit la main.

— Vous avez deux blessures, je le sais, monsieur ; laissez aux autres la chance de montrer plus tard de si glorieuses cicatrices.

Cependant les Impériaux accouraient, animés d’une soif de sang. Les adieux des dragons furent rapides, mornes, presque muets. Adrienne et Diane, qui ne savaient rien de ce qui avait été décidé, partirent étonnées de ne point voir M. de la Guerche et Renaud à leurs côtés ; au premier coude que faisait le défilé dans la montagne, M. de Saint-Paer entendit comme un coup de tonnerre derrière lui : c’était la fusillade qui commençait.

— Dieu !… s’écria Adrienne, ils se battent ! Ainsi qu’elle, Diane retint la bride de son cheval.

— Madame, dit M. de Saint-Paer, j’ai charge d’âme… j’ai répondu de votre salut sur mon honneur… marchons !

Les deux jeunes filles ramenèrent un voile sur leur visage pour ne pas laisser voir qu’elles pleuraient, et tandis que leurs chevaux suivaient la rampe du défilé, le bruit de la fusillade, diminué lentement par la distance, mourait dans l’éloignement.

M. de Saint-Paer marchait le dernier, la tête basse.

On sait que des quartiers de rocher précipités par les huguenots embarrassaient le défilé ; mais dans les intervalles ouverts parmi leurs décombres, deux ou trois hommes pouvaient encore passer au risque de la vie.

Jean de Werth, fou de rage, lança les Impériaux contre ce rempart improvisé.

Ils étaient mille d’un côté, cinquante de l’autre ; mais la route étroite se tordait en longs replis. Deux hommes à peine pouvaient