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Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/64

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prononcer les noms sans éprouver la sensation d’un fer chaud, partent un matin de Magdebourg l’âme remplie de noirs projets ; ils en méditent la perpétration chemin faisant ; mais Dieu, qui ne permet pas le triomphe des méchants, les fait entrer un soir dans une hôtellerie dont le propriétaire est un saint homme, dévoué aux intérêts éternels de la religion. On excite sa piété par une offrande, et il ouvre la porte de sa maison au bras séculier.

— Sans que le nom et la réputation de personne soient compromis ?

— Monseigneur prend-il cette robe vénérable pour les langes d’un enfant ? Non, non, le bras que voici a mis en pratique bien souvent la devise d’un philosophe dont le nom m’échappe : célérité et discrétion.

— C’est un bras vertueux et prudent.

Le capucin s’inclina et remplit son assiette aux dépens du pâté, qui menaçait ruine.

— J’imagine en outre, poursuivit-il, que Votre Seigneurie a horreur comme moi des violences inutiles et de l’effusion du sang. Ce que nous voulons, c’est moins la mort du pécheur que sa conversion.

— Sans doute.

— Et puis un coup de poignard qui fait passer de vie à trépas ne laisse point aux âmes le temps de se repentir et de se racheter par d’abondantes aumônes. Il faut que le spectacle des misères et des souffrances auxquelles elles vont être condamnées attendrisse ces âmes et les dispose à la pénitence. Ainsi, votre huguenot mort, Mlle de Souvigny persévère dans son entêtement : qu’y gagnez-vous ? Le plaisir du triomphe. C’est quelque chose sans doute, mais ce n’est pas tout. M. de la Guerche, au contraire, enfermé dans quelque cachot profond, et suppliant cette personne obstinée de répondre aux vœux de Votre Seigneurie