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PARTENZA…

Dehors, maintenant, dans le gai pullulement de la rue, des soldats passent, aux figures de gamins ; le plus âgé paraît avoir dix-huit ans. J’ai vu en Espagne de petits troupiers, — dont, en passant, je salue avec émotion la lutte héroïque[1] contre la Force et l’Argent également immondes ; — ceux d’ici leur ressemblent ; ils ont aussi leurs figures juvéniles et si gentiment résignées des garnisons de la Linea et d’Algéciras, aux portes de Gibraltar, où les highlanders blonds et roses montrent leurs jambes nues dans des jupes écossaises ; les highlanders aux yeux bleu pâle d’une expression insaisissable. Mais je préférais les beaux yeux noirs et fatigués, et la figure bronzée des Espagnols pauvres et courageux comme les jeunes gens qui défilent en ce moment devant moi, descendant, vers le port, la via Roma. Ils ne sont pas faits pour l’uniforme, les petits Latins de l’extrême Midi. Je vois là, sous les longues plumes aux reflets métalliques capricieusement flottantes sur la coiffure ronde des bersaglieri, des prunelles noires très mélancoliques. De petites lèvres joliment bordées d’un duvet imperceptible sont entr’ouvertes avec des airs de lassitude, tandis que les sourcils se froncent et racontent le labeur de ces fils douloureusement pliés aux rigueurs du militarisme. Leurs officiers sont heureux de vivre, sanglés en des uniformes très avantageux, en des pantalons gris très ajustés dans lesquels ils se cambrent. Les petits soldats peinent. Eux passent triomphants dans

  1. La guerre Hispano-Américaine de Cuba.
10.