Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/307

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une robe de chambre d’indienne déteinte sur le dos, et armée d’une épée ; c’était le cousin, réveillé par le bruit, et qui arrêta l’héritier du Majorat, en lui disant :

— Est-ce vous, cher cousin, ou votre esprit ?

— Mon esprit, reprit ce dernier tout troublé, car je ne sais comment j’ai été transporté ici, au milieu des anges.

— Rentrez dans votre chambre, repartit le cousin, sans cela, mes pigeons vont quitter leurs œufs, et en bas, mes dindons ne veulent pas rester tranquilles ; c’est vous sans doute qui êtes allé les troubler. Je ne pouvais m’expliquer ce bruit dans l’escalier et ce tapage chez mes bêtes, qu’en supposant un voleur venant de la rue des Juifs ; mais j’aime mieux encore que ce soit vous ; vous êtes peut-être somnambule, mon cher cousin, c’est une maladie que je sais guérir.

En causant ainsi, il ramena le jeune héritier dans sa chambre. Celui-ci prit le parti d’avouer à son cousin qu’il avait vu Esther tomber prise d’une attaque de nerfs, et que, dans sa précipitation pour aller à son secours, il s’était trompé de porte.

— Quel bonheur, s’écria le cousin, car si la porte de la rue avait été ouverte, vous ne seriez pas entré dans cette maison sans qu’il vous arrivât quelque malheur.