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HUMOUR ET HUMORISTES

vit que de l’observation directe, minutieuse, exacte, des êtres et des choses.

Elle s’appuie sur les faits particuliers, individuels, elle raille ensuite, mais elle ne fait jamais l’un sans l’autre. L’homme d’esprit, au contraire, se passe de la réalité : il aime l’abstrait et le général, l’humoriste a toujours besoin du concret.

Comme je m’arrête, un peu essoufflé, mon vieil ami croise les bras.

— Mais, alors, pourquoi tant de différence entre les humoristes ?

— Cette différence réside seulement dans la nature de leur raillerie. Tous, les plus fantaisistes comme les plus précis, ne cessent jamais d’observer le réel. Mais si l’humoriste observe avec sympathie, son ironie est émue : Sterne, par exemple ; s’il observe avec amertume, elle est âpre et méchante : Swift. Ou bien il déformera le réel, le grandissant, l’exagérant, pour mieux nous frapper : Rabelais, Twain ; ou bien il suivra le réel pas à pas, se contentant par sa perpétuelle raillerie d’en dégager le comique : T. Bernard.