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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

la famille Davernis que je préside cette réunion. Je vous parle avec toute mon âme. Les fiançailles de Mlle Marie m’ont apporté une satisfaction très douce. Certes, je suis toujours heureux de voir au pied de nos autels des demoiselles, pieuses servantes du Seigneur. Mais combien plus tendre à mon cœur est le spectacle de deux époux chrétiens. Une vieille demoiselle, c’est un foyer qui s’éteint. Une jeune femme, c’est un foyer qui s’allume. Mademoiselle Marie, vous réalisez le gracieux modèle qui vous est tracé dans notre sainte liturgie : « Vous serez aimable comme Rachel, sage comme Rébecca, fidèle comme Sara. » Monsieur Hyacinthe, vous avez la bonté de Jacob. Dieu bénira vos fiançailles comme il a béni celles de Booz et de Ruth. C’est dans cette intention que je lève mon verre en votre honneur...

Un murmure approbateur suit ces mots. Rosalie, habituée aux sermons, fait le signe de la croix. On boit à la santé d’Ulysse et de Marie. Après quoi on attend le discours du professeur.

Celui-ci bredouille :

— Mesdemoiselles... excusez-moi... l’émotion... Je suis trop heureux... me serre la gorge... Je charge mon neveu, ici présent, de vous dire ma reconnaissance... Dis ? Eugène, tu vas dire à ces demoiselles... ce que je devrais leur dire... et ce que tu leur diras mieux que moi...

Cette petite scène a été réglée à l’avance pour donner à M. Duthoit l’occasion de « briller ». M Hyacinthe est à peine assis que l’autre est déjà debout et parle avec un aplomb prétentieux :

— Mesdemoiselles, je ne peux pas me soustraire à l’invitation que mon oncle, qui fut le frère de mon père, m’adresse. Je le peux d’autant moins que la mission, dont il me charge, est infiniment agréable. Il s’agit pour moi de vous exprimer sa reconnaissance. La place que vous lui offrez dans votre famille, dans votre maison, dans votre cœur, est si belle que jamais sa mère, qui fut ma tante, n’aurait pu en rêver de meilleure. Je ne connais pas, dans l’histoire universelle et dans la littérature française, de fiançailles qui se soient présentées sous de plus favorables