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Se recueillant, les voyageurs
Baissaient la voix sous son dais sombre ;
Les bateliers et les nageurs
Craignaient l’eau glissant à son ombre.

Sur son noir branchage, alangui
Par les ans, les tares, les plaies,
La grive avait greffé le gui
En bouquets verts à blanches baies.

De son vaste chef éploré
Tombaient, accablements de l’âge,
Autour d’un fut décoloré
Comme des larmes de feuillage !

Ses larges flancs cicatrisés
En lignes sévères, arides,
De la foudre aux traits ardoisés
Montraient les verticales rides.

Dans l’épaisseur de son bois creux,
Au seuil de sa taille géante,
S’ouvrait, repaire dangereux,
Une crypte obscure, béante ;

Là, de frelons velus, hardis,
Une insolente myriade
Bourdonnait, où veilla jadis
La fidèle Hamadryade ;

Là, vrilles tenaces, les vers,
Déblayant leurs fines striures,
Tamisaient, dans les longs hivers,
Une montagne de sciures !

Ses racines, serpents noueux,
Crispés en de sinistres formes,