Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/183

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mon père a rappelé le roi. Le baron le dit comme tout le monde. Mais M. De Praxi-Blassans sautillait sur ses pointes, se débattait, protestait de sa voix criarde, que démentaient son sourire et la joie de voir approuver sa manœuvre. ― allons, allons ! ― reprit Malvina, ― ne vous défendez plus. La cause est jugée… la ruse a vaincu la force, et lui succède… ― vive le roi ! Proclamait la rue. On courut aux fenêtres. La garde nationale rectifiait promptement ses lignes au long des bornes ; la digue humaine s’immobilisa, sous les baïonnettes au soleil, pour contenir les flots de peuple. De toutes parts, les musiques éclatèrent. Au loin, il tonna. Le canon saluait. Et les carillons des églises sonnèrent l’allégresse. Dans la multitude, le piétinement cessa ; la rumeur acheva de mourir. Au sommet de son échelle double, la jeune femme en rose, plus timidement, confiait à la brise l’ondulation de son écharpe blanche. En toutes les fenêtres, des bouquets de figures s’épanouirent. L’artillerie grondait. Les cloches acclamaient. Des banderoles flottèrent. Les dames grimpaient sur des chaises qu’on tirait des boutiques. Les élégantes tenaient d’une main les visières de leurs grands chapeaux. Des commandements furent criés. Les lumières verticales des fusils barrèrent la hauteur des uniformes et des bicornes en bataille. On entendit tinter encore la sonnette du marchand de coco, et grincer la crécelle de la vendeuse d’oublies. Enfin ce bruit même s’interrompit net. Et ce furent des trompettes de cavalerie, un escadron de carabiniers étincelants, colossaux, cuirassés de cuivre, casqués d’énormes chenilles rouges. Ensuite caracola un essaim de gentilshommes en frac bleu, coiffés du lampion à cocarde blanche ; ils montaient