Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/339

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cassa la voix. Exposés en 1855, ses cartons valurent à leur auteur une première médaille.

Chenavard m’invite à aller voir ses cartons. J’y vais le lendemain, et malgré mon peu de goût pour l’universel, je suis émerveillée.

Alceste a très peu de succès auprès des abonnés de l’Opéra et c’est un nouveau chagrin pour Berlioz. Il vient saluer Mme  d’Agoult et moi ; nous causons tous deux d’Alceste avec passion. Mes yeux sont encore pleins de larmes. « Là où vous pleurez, ils baillent, » me dit-il d’un geste extraordinaire qui ramasse toute la salle.

Jules Simon entre dans notre baignoire, s’y assied et cause avec Mme  d’Agoult de cent choses, tandis que Berlioz, en dehors de la loge, me parle de Piccini, de Gluck, me dit que Piccini peut émouvoir une âme sensible, mais que Gluck angoisse et étreint une âme forte.

Jules Simon passe en revue ses griefs contre l’Empire ; la guerre de Chine est finie, on va certainement en recommencer une autre au Mexique. En revanche, on reste neutre aux États-Unis. Et Jules Simon gémit. On l’appelle volontiers le « pleurard » dans notre milieu.

C’est un écrivain de valeur, et l’Histoire de l’Ecole d’Alexandrie, Platon et Aristote, sont des œuvres que j’apprécie hautement. Je le crois sincèrement libéral, et le dernier volume que j’ai lu de lui, La liberté de conscience, est un acte courageux. Quoique Jules Simon prétende, je ne sais pourquoi, être un peu mon